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2 juin 2011 4 02 /06 /juin /2011 15:07

011-copie-2 

En octobre 1925, Ernest Hemingway offre à son épouse Hadley, un tableau de Joan Miro "La Ferme". Avec des amis américains, ils ont séjourné durant l'été de la même année en Espagne. Hemingway est un passionné de courses de toros ; son ami, le peintre Waldo Peirce, qu'il a connu à Paris en 1927, a peint une scène avec des toros arrivant dans les arènes de Pampelune. Hemingway lui écrit en avril 1932 de Key West (Etats-Unis) : "Cette maison est extra. Te la rappelles-tu en face du phare ? Une maison qui faisait penser à un assez bon Utrillo, quelque chose entre ça et 'la Ferme' de Miro." Ce peintre, l'auteur de "L'Adieu aux armes" l'a rencontré chez lui à Mont-Roig près de Tarragone en avril 1929.

Le village de Mont-Roig, que Miro a peint dès 1919 ("Mont-Roig, l'église et le village"), se trouve à quelques kilomètres de Cambrils, village de pêcheurs devenu l'un des hauts lieux du tourisme balnéaire en Catalogne. Hemingway a montré à Miro des oeuvres de son ami Peirce : "Tes deux perdrix et un fusil, un rudement beau tableau, sont au-dessus de la cheminée de la salle à manger. Tout le monde à Paris, c'est-à-dire Miro et Masson et autres, étaient fous de tes deux brochets, ou plutôt brochetons, sur le plat avec la truite. En as-tu peint d'autres de ce genre ?" 

Joan Miro est né à Barcelone en 1893. Il s'installe à Paris au début des années 20 où il fait la connaissance de Picasso, de Max Jacob, de Tzara, d'André Masson, s'intéresse au mouvement dada, puis adhère au surréalisme. Selon Jean Cocteau, "l'influence sur Miro des premiers dessins animés : Felix le chat" a dit de lui :"Ce qui sauve Miro ; sa ligne vivante. Il lui suffit de faire une croix pour crucifier" et "un Picasso avalait des sabres. Cela lui laisse un goût amer dans la bouche. Un Miro suce des sucres d'orge et les met en pointe. La pointe est toujours plus fine ; mais le sucre d'orge est toujours plus court". Dans les dernières années de sa vie, à Palma de Mallorca, Miro privilégie le dessin sur papier, n'importe quelle sorte de papier, même des cartes d'invitation, support utilisé pour le "Personnage étoile", un des derniers dessins qui témoigne de la simplicité et de la vitalité de l'oeuvre de Miro. 

La Fondation Miro, construite sur les plans de l'architecte Josep Lluis Sert, ami personnel du peintre, décédé comme lui en 1983, a été conçue pour rechercher un équilibre permanent entre l'extérieur et l'intérieur, entre le paysage et le bâtiment. Les visiteurs peuvent y voir des peintures, des sculptures, mais aussi des collages et des oeuvres graphiques. La fondation se trouve sur la colline de Montjuïc. En France, la Fondation Maeght (Saint-Paul, Alpes Maritimes) présente aussi des oeuvres de Miro.            

 

 

Photo, Barcelone, ville natale du peintre Joan Miro.

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1 juin 2011 3 01 /06 /juin /2011 09:35

 

 

"Bernard Dimey n'est pas mort le dix mai,

On aurait cru qu'il l'avait fait exprès :

L'est mort le premier juillet au matin

Et rud'ment bien." Jacques Debronckart

 

 

Le 1er juillet 1981, Montmartre perdait un de ses derniers poètes, un homme qui avait le coeur aussi grand..., qui a écrit "Moi qui n'ai rien écrit" et "Je ne dirai pas tout" ; or, tout nous reste à dire sur celui qui a hanté les nuits de la Butte et des Halles et qui regagnait au petit matin son logement de la rue Germain Pilon.

 

 

"Le jour se levait lentement, d'un gris très doux, lavant toutes choses d'une teinte claire d'aquarelle. Ces tas moutonnants, comme des flots pressés, ce fleuve de verdure qui semblait couler dans l'encaissement de la chaussée, pareil à la débâcle des pluies d'automne, prenaient des ombres délicates et perlées, des violets attendris... ; et à mesure que l'incendie du matin montait en jets de flamme, au fond de la rue Rambuteau, les légumes s'éveillaient davantage, sortaient du grand bleuissement traînant à terre." (1)

En 1851, la construction des halles centrales remplace les étalages sous tentes et parapluies et fait place à un lieu pavé et propre.

"Situé d'abord en plein vent, le 'carreau' de Baltard se composera dorénavant d'allées couvertes et de trottoirs qui entourent les pavillons... Avant 1914, la redevance y est de trente centimes au mètre carré. Toutes les provinces françaises y sont représentées, de la Bretagne à la Provence, de l'Alsace à la Vendée. On y rencontre même des Parisiennes..." (2)

Le marché en gros où viennent s'approvisionner tous les marchands qu'ils soient de Paris, des environs et même de l'étranger, est ouvert de 3 heures du matin à 8 heures durant l'été, de 4 à 9 durant l'hiver. Les halles centrales sont connues pour leurs 'Forts', hommes réputés pour leur vigueur au travail et leur grand appétit, réunis en corporation officielle relevant de la préfecture de police, où la hiérarchie est scrupuleusement respectée. Beaucoup occupent un second emploi durant la journée.

"Les boutiques de la rue Berger sont réputées pour leur pittoresque. La moins courue n'est certainement pas le 'Cygne de la Croix' qui attire en permanence les amateurs de Beaujolais. Le 'Petit Manteau bleu' rappelle le souvenir du sieur Champion qui, vers les années 1880, offrait la soupe gratis aux indigents." (2)

Le 28 février 1969, les derniers marchands de fruits et légumes quittent définitivement les Halles de Baltard pour celles de Rungis, comme le rappelle une sculpture polychrome de Raymond Mason, exposée en permanence dans l'église Saint-Eustache.

 

 

"Je ne reviendrai plus dans le quartier des Halles.

Mes diables sont partis, pour Dieu sait quel enfer...

Les touristes ont marché sur les derniers pétales

De nos derniers bouquets, on ne peut rien y faire.

Je ne suis pas client pour les pèlerinages.

Bien le bonjour chez vous ! Je ne reviendrai plus,

J'emporte mes souv'nirs avec le paysage,

Le passé dans ma poche et mon mouchoir dessus.

 

Lèvres couleur de sang et du velours aux châsses,

La belle sans merci fumaille en rêvassant.

Au pas lent des années j'étais celui qui passe,

Mais de Sainte Apolline au Squar' des Innocents

On ne me verra plus jamais traîner mes guêtres

Au gré des muscadets de quatre heur's du matin

Avec mon cinéma tout vivant dans ma tête

Et l'étincelle froide au regard des tapins.

 

J'allais déambuler... je croisais des fantômes,

Tire-laine en ribotte ou pendus décrochés,

Et ça tourbillonnait autour des jolies mômes

Maculées de sang frais par les garçons bouchers.

Les camions de lilas s'ouvraient en avalanches

Et tout autour de moi l'air sentait le printemps.

En des temps très anciens, Saint-Eustache était blanche.

Là-bas j'étais chez moi, bien peinard, et pourtant

 

On ne me verra plus dans le quartier des Halles,

Ce qui peut s'y passer ne m'intéresse plus...

Les temps sont accomplis, à nous de fair' la malle,

Je ne suis pas client pour les regrets non plus...

Adieu mes fleurs de sang, mes panthères de jeunesse,

Je vais aller traîner sur les quais de Bercy.

Malgré moi j'ai le coeur éclaté de tendresse,

Saint-Eustache a gagné, les diables sont partis." (3) 

 

 

(1) Extrait du livre d'Emile Zola, "le Ventre de Paris", cité dans le livre de Georges Renoy "Paris en cartes postales anciennes, Louvre - Bourse". Emile Zola est né rue Saint-Joseph, entre la rue Montmartre et la rue du Sentier, à deux pas des Halles.

(2) Même ouvrage que ci-dessus.

(3) "Le Quartier des Halles", Bernard Dimey.   

 

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31 mai 2011 2 31 /05 /mai /2011 09:14

006-copie-7.JPGNe rien posséder, mendier son pain quotidien, prêcher, tel fut l'idéal des dominicains. Cet ordre fut fondé par Dominique de Guzman (1170-1221), Espagnol originaire de la Vieille-Castille, après un voyage dans le sud de la France au cours duquel il fut frappé par l'importance de l'hérésie cathare. Il comprit que les meilleurs arguments ne servaient à rien et qu'on ne pouvait combattre qu'avec ses propres armes ; la création de l'Ordre des Frères prêcheurs procède d'un désir de combat. Le succès de cet ordre mendiant fut rapide car il se mêlait aux populations urbaines qui aimaient ces moines humblement vêtus, vivant d'aumônes, et qui assistaient les pauvres et les malades au lieu de rester cloîtrer derrière les murs de leurs couvents. Saint Dominique fut à l'origine d'une grande tradition intellectuelle, et les dominicains fournirent au 13ème siècle Albert le Grand (1193-1280), principal penseur du Moyen Age mais aussi physicien et chimiste, et saint Thomas d'Aquin (1225-1274) considéré comme l'un des plus grands théologiens de la chrétienté.

Les dominicains fondèrent un monastère à Collioure en 1290. L'église encore visible de nos jours, date dans son ensemble de la première moitié du 14ème siècle. Axée nord-sud, elle a une nef unique - de 32 mètres de longueur et 14,50 mètres de largeur -, avec des chapelles latérales entre contreforts, suivant un modèle très fréquent dans l'architecture des ordres mendiants. Couverte d'une charpente, la nef fut voûtée aux environs du 15ème siècle. Sur la façade s'ouvrait le portail principal vers le nord, vers la ville. Un cloître s'élevait à l'ouest de l'église. Dès la fin du 18ème siècle, les bâtiments passèrent dans les mains de particuliers qui procédèrent à de radicales transformations et destructions en fonction de leurs besoins. Au début du 20ème siècle, il ne restait du cloître que sa galerie orientale dont les arcades avaient été murées afin d'aménager un atelier de salaison. Bien que classées au titre des Monuments historiques en 1928, les arcades restantes du cloître furent vendues en deux lots, un lot de six chapiteaux qui partit pour les Etats-Unis, un autre lot comptant onze doubles colonnettes acquis par un Anglais qui avait une propriété à Anglet (Basses-Pyrénées). Le Conseil général des Pyrénées-Orientales a pu, au début des années nonante, racheté quatre des six chapiteaux dans une salle des ventes à New York, et la municipalité de Collioure a récupéré une partie des colonnes.  Le cloître a donc pu être en partie remonté dans le jardin du musée d'Art moderne Peské qui se trouve en face de l'église décrite ci-dessus, église qui appartient depuis 1926 à une société coopérative de vinification. Du couvent des dominicains de Collioure, seuls sont visibles aujourd'hui, l'église, amputée de son chevet, et quelques vestiges du cloître.

 

Cet article a été réalisé grâce à la lecture de deux ouvrages : "L'Eglise médiévale, les croisades, l'Asie mongole", tome 6 de la collection "Histoire universelle illustrée" parue chez Hachette en 1968, et "Un Palais dans la ville" au chapitre consacré au couvent des dominicains de Collioure par Géraldine Mallet (colloque au Palais des Rois de Majorque des 20, 21 et 22 mai 2011).  

 

 

Photo, l'église du couvent des dominicains de Collioure telle qu'on peut la voir aujourd'hui.        

 

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30 mai 2011 1 30 /05 /mai /2011 09:33

004 

Chaque lundi jusqu'au début de l'été, nous roulerons sur la Highway 66 à la découverte d'une ville, d'un village, d'un musée, d'une église, d'une personnalité, d'un petit bout d'histoire des Pyrénées-Orientales. Aujourd'hui parlons du peintre Raoul Dufy (1877-1953) et de ses séjours en Roussillon.

 

Le 10 juin 1940, l'Italie déclare la guerre à la France. Par crainte des bombardements, Raoul Dufy quitte Nice, où il s'était réfugié quelques mois plus tôt, avec sa femme, pour les Pyrénées-Orientales. Le peintre natif du Havre, qui a souvent peint la plage de Sainte-Adresse et des paysages proches de Marseille, est connu pour avoir réalisé en 1920, les décors et les costumes du "Boeuf sur le toit", un ballet de Jean Cocteau mis en musique par Darius Milhaud, et en 1937, la gigantesque fresque "la Fée Electricité" présentée lors de l'Exposition universelle de Paris en 1937. 

Raoul Dufy est atteint de polyarthrite et c'est à Céret, dont on lui vante le climat favorable, qu'il se rend et qu'il fait la connaissance de Pierre Brune, peintre à l'origine de la création du musée d'Art moderne du chef-lieu du Vallespir. Malgré la douceur du climat, l'état de santé de Dufy ne s'améliore pas et sur les sollicitations de Brune auprès de son ami le docteur Pierre Nicolau, il est admis à la clinique des Platanes à Perpignan début 1941. Après un séjour bienfaisant dans cet établissement, Raoul Dufy est invité par le docteur Nicolau à rester chez lui rue de la Poste (actuelle rue Jeanne d'Arc) et le salon de son appartement devient l'atelier du peintre pendant six mois. 

En 1943, Dufy retourne à Paris dans son atelier de l'impasse de Guelma dans le 18ème arrondissement, qu'il loue depuis 1911 et qu'il gardera jusqu'à son décès survenu à Forcalquier dans les Basses-Alpes en 1953.

En 1944, Raoul Dufy réalise les décors et les costumes de la pièce d'Armand Salacrou, "les Fiancés du Havre", mise en scène par Pierre Dux et jouée à la Comédie-Française. Après un séjour à Vence, il s'installe en 1946 dans un nouvel atelier à Perpignan, à l'angle de la place Arago et de la rue de l'Ange, où se trouve une imposante console rococo surmontée d'un grand miroir que l'on voit dans beaucoup de ses tableaux, dont "le compotier de pêches à la console" peint en 1948. Ces deux meubles, la console et le miroir, se retrouvent souvent dans les oeuvres de Dufy ; le miroir ne renvoie aucune image et n'intervient que comme composante lumineuse de l'ensemble.

C'est l'époque où il rencontre le violoncelliste Pau Casals et où il reçoit de nombreux amis dont Marcelle Oury, mère du réalisateur de "La Grande vadrouille", qu'il a rencontrée à Paris, le 24 juin 1911, lors d'une fête persane organisée par le couturier Paul Poiret et baptisée "la Mille et deuxième nuit". Dufy avait dessiné l'invitation et avait décoré le velum qui protégeait le jardin de la chaleur de l'été naissant. Pour Marcelle Oury, il peint "Nature morte aux poires et aux citrons" (1946), aquarelle sur papier qu'il dédicace d'un "A Marcelle Oury que je retrouve à Perpignan ce 23 fév. 1946 - Raoul Dufy". Des fenêtres de son atelier, il peut voir le spectacle de la place Arago : carnavals et sardanes sont pour lui des plaisirs. Il écrit à son ami Ludovic Massé : "A Perpignan nous avons des Sardanes au Palmarium, c'est plus agréable que le Jazz." (1) Son état de santé s'améliore. Le 13 août 1946, toujours à Ludovic Massé, il écrit : "J'ai continué à mieux me porter, j'ai fait de grands progrès comme état général ; j'ai repris appétit et sommeil, pas mal de forces musculaires, mais les jambes sont toujours un peu en retard. Vous verrez ça quand vous rentrerez. (2) J'ai eu quelques visites d'amis du dehors qui récréent mon séjour estival perpignanais. Hier, je suis allé au cinéma et j'espère, vendredi, aller à la corrida de Collioure." A la fin de ce même mois, Dufy doit partir pour faire une nouvelle cure. "La santé n'est pas trop mauvaise ; il y a du mieux et puis il y a des rechutes ; pour l'instant, j'ai tout récupéré de ce que j'avais perdu ces derniers jours et alors je suis de nouveau dans le chemin de l'espoir. Je vais partir, samedi, à Thuès-les-Bains ; j'espère que je vais m'améliorer à l'aide de ces célèbres eaux sulfureuses et que je pourrai, en revenant, arpenter les rues de Perpignan la canne à la main ; pour danser la sardane, je crois que ça sera encore plus long." (3)

Le 28 octobre 1946, il écrit, toujours à Ludovic Massé : "J'ajoute que je suis allé au théâtre, nous avons rencontré des amis charmants dans la troupe et après un souper très joyeux, je suis rentré, en remontant mon escalier sur le coup de 4 heures du matin." Raoul Dufy était gourmand, se risquant à quelques excès de temps en temps, étant donné son état de santé. Cet état de santé qui le contraint à faire une cure à Caldes de Montbui en Catalogne et même à partir pour Boston (Etats-Unis) où il subit un traitement à la cortisone dans l'hôpital du professeur Freddy Homburger, en 1950. "Le traitement de Cortisone et d'A.C.T.H. est terriblement fatigant pour moi. Il commence à avoir des résultats excellents. Je peux marcher 10 minutes sans canne ni béquilles, les articulations sont bien dégagées mais l'atrophie musculaire est extrêmement dure à récupérer. (...) Le traitement se prolonge plus que je ne pensais, mais je ne veux quitter mon Dr Homburger que lorsque celui-ci aura établi le plan de la continuation du traitement ; on pourra combiner avec tous les autres moyens ; cures thermales, gymnastique, bains Salmanoff. (...) Mon Dr Homburger est un type magnifique ; nous sommes devenus de vrais amis ainsi que sa femme." (4) Après un  séjour dans l'Etat de l'Arizona, au début de l'année 1951 ("Je suis venu en Arizona pour fuir le climat froid et humide du nord."), Raoul Dufy rentre en Europe et s'installe à Forcalquier où il décède le 25 mars 1953.

   

 

(1) Extrait d'une lettre de Raoul Dufy à Ludovic Massé datée du 20 août 1948.

(2) Ludovic Massé, qui habitait 29 rue Vauban à Perpignan, avait aussi un appartement à Paris, 180 rue Lecourbe, et allait souvent en villégiature à Massat dans l'Ariège.

(3) Extrait d'une lettre à Ludovic Massé datée du 28 août 1946.

(4) Extraits d'une lettre à Ludovic Massé datée du 16 juin 1950.  

 

 

Photo, l'immeuble de la place Arago (Perpignan) où Raoul Dufy avait son atelier dans les années 40.

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29 mai 2011 7 29 /05 /mai /2011 08:54

 

 

 

LE POETE DE TRENTE ANS

 

 

Me voici maintenant au milieu de mon âge,

Je me tiens à cheval sur ma belle maison ;

Des deux côtés je vois le même paysage,

Mais il n'est pas vêtu de la même saison.

 

Ici la terre rouge est de vigne encornée

Comme un jeune chevreuil. Le linge suspendu,

De rires, de signaux, accueille la journée ;

Là se montre l'hiver et l'honneur qui m'est dû.

 

Je veux bien, tu me dis encore que tu m'aimes,

Vénus. Si je n'avais pourtant parlé de toi.

Si ma maison n'était faite avec mes poèmes,

Je sentirais le vide et tomberais du toit.

 

Jean Cocteau

 

 

QUARANTE ANS

 

 

Quarante ans, quarante ans, mais c'est le bout du monde !

Je me suis dit cela, c'était à peine hier,

Et voilà qu'aujourd'hui c'est question de secondes...

Quarante ans, pas déjà... Sinon, à quoi ça sert

D'avoir eu dix-huit ans, des cerises à l'oreille

Et des fleurs aux cheveux, d'avoir tout espéré ?

L'amour à lui tout seul était une merveille,

Et puis le temps passait, dont je n'ai rien gardé.

 

Quarante ans, quarante ans, c'est presque ridicule...

Je n'ai rien fait du tout, sinon quelques erreurs.

L'innocent que j'étais, je le vois qui recule.

Il peut bien s'en aller, je le connais par coeur,

Je le connais déjà depuis quarante années,

De face et de profil, en noir et en couleurs,

Et ses anges gardiens et des âmes damnées,

Je sais ce qui l'enchante et ce qui lui fait peur...

 

Quarante ans, quarante ans, non ce n'est pas possible,

Pas aujourd'hui, demain, une semaine ou deux...

Hier on me traitait encore d'enfant terrible !

Comment aurais-je fait pour être déjà vieux ?

Quarante ans, oui, déjà... C'est beaucoup pour mon âge.

Pauvre petit jeune homme, on a des cheveux gris,

On est un peu morose, on va devenir sage,

On n'a pas fait grand chose et l'on n'a rien compris...

 

Bernard Dimey  

 

 

 

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27 mai 2011 5 27 /05 /mai /2011 08:18

037 Au printemps de l'année 1923, Ernest Hemingway effectue son premier voyage en Espagne et il se passionne vite pour les courses de toros. De ce séjour, il rapporte des nouvelles sur ce qu'il a vu dans les arènes d'Espagne, dont celles de Pampelune. Il y retourne en 1924 puis en en mai 1926, puis en 1931, alors que la République vient d'être proclamée. L'année suivante parait son livre "Mort dans l'après-midi" ébauché dès 1925, dans lequel il explique ce qui l'a attiré vers la corrida : "Je m'essayai au métier d'écrivain, en commençant par les choses les plus simples, et l'une des choses les plus simples de toutes et des plus fondamentales est la mort violente." Il ne cesse alors de retourner en Espagne où il suit la vie politique qui ne le rend pas optimiste quant à l'avenir démocratique de celle-ci. Le 16 octobre 1933, il écrit depuis Madrid : "L'Espagne est dans ce qu'on appelle une situation confuse. Tous les idéalistes à présent au pouvoir se partagent le gâteau et ils en sont arrivés au point où les parts sont plutôt minces. Quand ils n'auront plus de gâteau il y aura une autre révolution."

 

"Si l'on se trouvait tout près de l'arène, on pouvait entendre Villalta grogner et injurier le toro. Lorsque le toro chargea, Villalta se campa fermement comme un chêne fouetté par le vent, les jambes bien serrées l'une contre l'autre, la muleta balayant le sol, entraînant l'épée dans sa courbe. Puis il lança une insulte au toro, agita la muleta, fit un pas en arrière pour affronter la charge, les pieds fermes, maniant la muleta ; à chaque pase la foule hurlait.

Lorsqu'il s'apprêta à tuer, tout se passa dans la même ruée. Le toro le fixa droit dans les yeux, le regard chargé de haine. Le torero dégagea l'épée de sous les plis de la muleta et la leva d'un même mouvement, appelant le toro, 'Toro ! Toro !'. La bête chargea et Villalta chargea et l'espace d'un instant, ils ne formèrent qu'un seul corps. Villalta se confondit avec le toro puis ce fut fini. Villalta debout, raide, tandis que la poignée rouge de l'épée restait plantée entre les épaules du toro. Villalta la main levée vers la foule tandis que le toro pissait le sang, le regard rivé sur Villalta, les genoux pliant peu à peu." Nouvelle d'Ernest Hemingway écrite en 1923.

 

 

Photo, la tauromachie, une passsion d'Hemingway.   

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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 09:13

028.JPGLe programme de mon prochain voyage organisé en Andalousie m'indique que le 7 novembre, je visiterai Séville par un tour de ville en autocar, via le Parc Marie-Louise, la Place d'Espagne et les principaux monuments de la capitale andalouse.

Même si l'Exposition universelle de 1992 a été une réussite - à l'occasion du 500ème anniversaire de la découverte de l'Amérique - nous ne parlerons ici que de l'Exposition ibéro-américaine de 1929 (couplée avec celle de Barcelone placée sous le signe de l'industrie, de l'art, de l'histoire et du commerce).

On a coutume de faire remonter l'origine de l'exposition ibéro-américaine de 1929 à la guerre de 1898, celle que l'Espagne a perdue face aux Etats-Unis à propos de Cuba. En 1898, l'Espagne possède encore aux Antilles les îles de Cuba et Porto Rico. "Or la guerre de 1812 contre l'Angleterre avait fait germer l'idée que le contrôle du golfe du Mexique était nécessaire à la protection de l'intégralité du pays : l'offensive britannique contre la Nouvelle-Orléans faillit réussir en 1814. Aussi le président Jefferson lança-t-il en 1823 une initiative destinée à acheter Cuba à l'Espagne qui échoua face au refus de la puissance coloniale. L'idée fut reprise en 1853. Le premier soulèvement à Cuba débute en 1868. Une frange de l'opinion américaine souhaite libérer la colonie de la tutelle espagnole. Les Etats-Unis sortaient d'une guerre civile, et conscient de la relative faiblesse militaire de son pays, le secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères repoussa l'idée. Une nouvelle offre d'achat fut faite en vain en 1895. Les émeutes de janvier 1898 obligèrent le président McKinley à prendre une décision. Il envoya le USS Maine à la Havane sous le prétexte officiel d'assurer la protection des intérêts et des Américains se trouvant dans la ville. L'incident décisif fut l'explosion de ce croiseur de 6 650 tonnes dans la nuit du 1er février 1898 causant la mort de 258 marins américains. La Chambre des Représentants vota la guerre le 18 avril par 311 votes favorables contre 6 et 38 abstentions. Le Sénat par 45 oui, 35 non, 12 abstentions." (*) On connait la suite, l'Espagne perd cette guerre et renonce à sa souveraineté sur Cuba et cède Porto Rico aux Etats-Unis. Un traité de paix est signé à Versailles le 10 décembre 1898, traité que le Sénat américain ratifie le 6 février 1899.

En 1909, l'idée d'une exposition qui rassemblerait des pavillons de toutes les anciennes colonies espagnoles aux Amériques est proposée. Elle sera sans cesse repoussée en raison de la guerre. Cependant, dès 1914, un projet de place d'Espagne, centre de la future exposition, est adopté. On abandonne l'idée, pour cette place, de bâtiments séparés pour une grande composition unitaire et structurée par une colonnade en hémicycle avec deux tours de 80 mètres de hauteur à chaque extrémité. La construction de cette place nécessitera quatorze ans, de 1914 à 1928. En 1926, les travaux entrent dans leur phase finale ; des terrains sont cédés aux différents pays d'Amérique latine où sont construits des pavillons encore visibles aujourd'hui, pour la plupart. L'Argentine ayant répondu la première à l'inviation de l'Espagne, c'est elle qui bénéficie d'un emplacement privilégié. Les pavillons sont construits dans les styles des pays représentés. Les Etats-Unis ayant été invités à participer à cette exposition, son pavillon est construit dans le style des Missions que l'on peut voir dans les Etats Texas, de l'Arizona et du Nouveau-Mexique. Le Portugal et le Maroc espagnol y ont aussi leur pavillon. Un hôtel, l'Alphonse XIII, et une ville nouvelle, Héliopolis, sortent de terre. L'exposition ouvrira ses portes au public le 9 mai 1929 et fermera le 21 juin 1930. Deux millions de personnes s'y presseront pour admirer les pavillons et se promener dans le parc tout proche baptisé du nom de Maria Luisa, aménagé par celui qui était alors le maître incontesté des jardins, collaborateur d'Adolphe Alphand sous le 2nd Empire (Bois de Boulogne et de vincennes, Champ de Mars à Paris) : Jean-Claude-Nicolas Forestier.

Comme en 1929, les villes de Séville et de Barcelone ont, en 1992, organisé conjointement des événements majeurs : l'Exposition universelle et les Jeux Olympiques.

 

(*) Extrait du livre de Jean-David Avenel, "La guerre hispano-américaine de 1898 - la naissance de l'impérialisme américain". 

 

Photo, détail de la colonnade de la Place d'Espagne à Séville.    

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25 mai 2011 3 25 /05 /mai /2011 09:15

 

 

"Bernard Dimey n'est pas mort le dix mai,

On aurait cru qu'il l'avait fait exprès :

L'est mort le premier juillet au matin

Et rud'ment bien." Jacques Debronckart

 

Le 1er juillet 1981, Montmartre perdait un de ses derniers poètes, un homme qui avait le coeur aussi grand..., qui a écrit "Moi qui n'ai rien écrit" et "Je ne dirai pas tout" ; or, tout nous reste à dire sur celui qui a hanté les nuits de la Butte et des Halles et qui regagnait au petit matin son logement de la rue Germain Pilon.

 

"Michel Simon chante Bernard Dimey" est un disque sorti chez Philips, où on entend les titres suivants : "Si je tombais dans la misère", "la Valise à Pierrot", "Pour apprendre l'air" et bien sûr "Mémère". Michel Simon, personnage principal de "Boudu sauvé des eaux" (1932) où il campe un clochard hirsute pour Jean Renoir et "le Vieil homme et l'enfant" (1967) de Claude Berri, a rencontré Bernard Dimey à Montmartre à la fin des années 50. "Toutes les vedettes en quête de chansons nouvelles se retrouvent Place du Tertre et Bernard Dimey les reçoit verre en main, jovial, truculent. Ainsi naissent quelques centaines de chansons qui seront interprétées par les plus grands : Charles Aznavour, Jean-Claude Pascal, Mouloudji, Juliette Gréco, Michel Simon. La liste constitue la plus fabuleuse affiche qu'un entrepreneur de spectacles puisse rêver." (1) La Taverne d'Attilio, le Pichet du Tertre, sont des antres que Dimey hante chaque soir en faisant tinter les vers qu'il écrit sur son quartier d'adoption, les clochards, les ivrognes, les prostituées... ou qu'il n'écrit pas car il pouvait parler en alexandrins et improviser selon l'humour, l'amour, le lieu et avec qui il se trouvait.

"...Mais qui veut la connaître, cette Butte, dans ses aspects les plus divers, se fera d'abord conduire place du Tertre et y prendre l'apéritif sur le zinc de Spielman. Là, tout lui donnera l'impression qu'il a quitté Paris pour un lointain village. Sur la place, des enfants s'amusent ; un vieux monsieur devant un chevalet, ou un tout jeune artiste, brosse sur la toile une vue du Sacré-Coeur ; des chiens errent ; des moineaux familiers vous entourent." (2)

C'est Edith Piaf qui a fait se rencontrer Bernard Dimey et Michel Simon. Bernard Dimey dira de lui : "Michel Simon c'était un personnage hors du commun, un homme du Moyen Age". Dimey venait d'écrire "Mémère". Selon Piaf, seul Michel Simon était capable de chanter de tels mots.

Quand Michel Simon décède en 1975, Dimey lui dédie un de ses plus beaux poèmes ; poème ? Dimey n'aimait pas ce mot qui pour lui avait une connotation élististe. A poème, il préfère le mot texte.

 

"A Michel Simon

 

 

Mon vieux Michel, c'est vrai qu'à présent tu nous manques.

Hier, j'ai cru te voir à Strasbourg Saint-Denis,

Mais le petit bordel céleste où tu te planques

Ne s'ouvre pas souvent, même pour les amis.

Le jour où t'es parti, on a fait la Mad'leine

Et la rue de la Lune et la rue Beauregard.

Toutes les fill's de joie avaient beaucoup de peine,

On l'sentait dans la voix, ça s'lisait dans l'regard.

 

Il paraît qu'on t'a vu sur le vieux quai des brumes

Traîner dans le brouillard, un carton à la main,

Seul entre chiens et loups quand les lumières s'allument,

Un singe sur le dos, un mainate à la main,

Zigzaguant dans la nuit comme un Jean de la Lune.

Michel, si t'es trop seul, tu peux venir chez moi

Et si tu cherches encore des plaisirs de fortune

Nous irons arpenter les avenues du Bois.

 

Michel, la fin du jour est-elle aussi tragique

Quand on a soixante ans de génie derrière soi ?

J'aimerais le savoir... La grande voix publique

Sur les petits écrans parle toujours de toi

Mais ta maison perdue dans ce jardin sauvage

Est-elle encore debout ? Le monde n'en sait rien.

Moi quand je te revois bouger sur des images

Je viens pousser ta porte en songe et j'y reviens.

 

Michel, je sais qu'un jour on chantera Mémère

Avec la voix d'Edith improvisant les choeurs

Sur une île perdue à des années-lumière

Et je te soufflerai, si tu sais plus par coeur..." (3) 

 

 

(1) "Bernard Dimey" par Philippe Savouret.

(2) Phrases de Francis Carco (1922) retranscrites dans "Paris en cartes postales anciennes - Butte-Montmartre" de Georges Renoy (1973).

(3) "A Michel Simon", Bernard Dimey.  

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24 mai 2011 2 24 /05 /mai /2011 08:32

 

Elisabeth Eidenbenz est décédée hier à l'âge de nonante huit ans. Volontaire du Secours suisse aux enfants, arrivée en France avec la Retirada, elle crée une maternité qui sauvera de nombreux enfants des horreurs de la guerre.

 

Le 23 décembre 1938, Franco déclenche une offensive pour envahir la Catalogne et percer les lignes républicaines. Au bout de dix jours, ses divisions font éclater l'ensemble du front et se rapprochent de Barcelone qui tombe presque sans combats à la fin de janvier 1939. Les armées franquistes remontent alors vers la frontière, poussant devant eux un demi-million de réfugiés et toutes les autorités républicaines qui sont autorisés à entrer en France à partir du 28 janvier. Des camps sont ouverts à la hâte pour les accueillir, notamment sur la côte : Argelès, Saint-Cyprien, Rivesaltes...

Arrivée en Roussillon avec la Retirada, Elisabeth Eidenbenz, jeune infirmière de la Croix rouge suisse, recueille au château d'En Bardou à Elne (Pyrénées-Orientales), avec le soutien matériel d'associations humanitaires suisses, françaises et américaines, des mamans pour leur très grande majorité internées dans les camps et sur le point d'accoucher. Six cents enfants y sont nés et ont survécu à l'écart des camps sordides d'Argelès, de Rivesaltes, du Barcarès, de Saint-Cyprien, jusqu'à la fermeture du lieu par les Allemands en avril 1944. Tous étaient enfants de réfugiés, Espagnols, Juifs, Tsiganes. Mais pour Elisabeth Eidenbenz, tous ces bébés et leurs mamans appartenaient à une même communauté humaine.

En 2007, la journaliste et romancière Hélène Legrais a consacré un roman (*) sur celle qui avait créé la maternité d'Elne en 1939, alors qu'un demi-million de réfugiés espagnols fuyaient l'avancée des troupes franquistes. Guy Eckstein, né à la maternité le 10 octobre 1941, a préfacé ce livre par ces mots : "Bien qu'elle n'ait au départ aucune connaissance spécifique en obstétrique et en pédiatrie, elle va, sans désemparer, bénévolement, et pour le plus grand bonheur de ses pensionnaires, remplir son rôle de directrice de la fin 1939 jusqu'en avril 1944.

Au milieu des privations et de la barbarie, la maternité suisse d'Elne devient alors, grâce au dévouement et au courage lucide d'Elisabeth, un îlot de paix certes relative, mais à tout le moins un lieu de don et de générosité."

La maternité d'Elne est créée sous l'égide du Secours suisse aux enfants victimes de la guerre et va recueillir pendant cinq ans des femmes sur le point d'être mères.

Hélène Legrais nous dit, à la fin de son livre, ce qu'est devenue cet établissement bienfaiteur : "Le château d'En Bardou, où était installée la maternité suisse, a été rachetée le 1er juillet 2005 par la ville d'Elne, grâce notamment à une grande souscription populaire.

Le but est de poursuivre l'oeuvre d'Elisabeth Eidenbenz en y créant une 'auberge humanitaire' pour accueillir des femmes et des enfants victimes des divers conflits qui ensanglantent notre planète."

Elisabeth Eidenbenz est décédée hier mais son oeuvre continue de sauver des vies...

 

 

(*)Le livre d'Hélène Legrais, "Les enfants d'Elisabeth" a paru aux Presses de la Cité. 

 

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23 mai 2011 1 23 /05 /mai /2011 17:48

 

 

 Pere Creixams, peintre catalan né à Barcelone en 1893 et décédé en 1965, fait actuellement l'objet d'une exposition au Centre d'Etudes Catalanes à Paris. Melle Anaïs Bonnel, commissaire de cette exposition, vous propose de la suivre à travers son oeuvre, au cours d'une visite guidée qui aura lieu le mardi 31 mai 2011, à partir de 19 heures. Pour y participer, la réservation est obligatoire. Quoi de plus simple de l'obtenir, il suffit d'envoyer un courriel de participation à l'adresse suivante : secretariat.etudes-catalanes@paris-sorbonne.fr ou de téléphoner au 01 42 77 65 69.

 

L'adresse du lieu de cette exposition est le Centre d'Etudes Catalanes, 9 rue Sainte Croix de la Bretonnerie, Paris 4ème, métro Hôtel de Ville.

 

Bonne visite à toutes et à tous et n'hésitez pas à laisser vos commentaires sur ce blog pour donner votre avis sur cette exposition et faire part de vos remarques. A bientôt !    

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